Le député national Olivier Katuala s’apprête à déposer ce lundi une démarche officielle d’interpellation contre la Gouverneure de la Banque Centrale du Congo (BCC), accusée de violation manifeste de la loi bancaire. Une action parlementaire inédite qui risque de secouer le secteur financier congolais.
Dans une déclaration rendue publique, le député affirme que l’Instruction n°18 (modifiée en juillet 2023), émise par la BCC, outrepasse les limites de l’institution en prolongeant illégalement un délai fixé par la loi n°22-069. En cause : l’article 62 de ladite instruction, qui accorde aux établissements de crédit trois ans pour se conformer à l’obligation de dilution de leur capital social – une mesure que la loi plafonne pourtant à six mois.
Une réglementation bancale ?
La loi bancaire impose aux établissements de crédit de répartir leur capital entre au moins quatre actionnaires significatifs, chacun détenant au minimum 15 %. Cette exigence, unique en Afrique, vise à éviter la concentration du pouvoir au sein des banques, mais elle soulève aussi de nombreuses critiques.
« Cette mesure atypique est non seulement contre-productive, mais elle fragilise aussi la compétitivité de notre secteur bancaire », dénonce Olivier Katuala. Selon lui, la BCC aurait dû solliciter le Parlement pour amender la loi au lieu de recourir à une instruction administrative qui outrepasse clairement les prérogatives constitutionnelles.
Un précédent grave pour la régulation bancaire
La démarche du député intervient alors que le Parlement examine une proposition de loi qu’il a lui-même déposée en septembre 2024. Ce texte vise à réformer les conditions d’agrément des établissements de crédit, en remettant notamment en question l’obligation de dilution.
« La Banque Centrale semble avoir reconnu, trop tard, l’inadéquation de cette exigence. Mais au lieu de collaborer avec les institutions légitimes, elle a choisi de contourner la loi. C’est un précédent fâcheux pour notre démocratie », regrette-t-il.
Des risques juridiques pour la BCC et les banques
Selon Olivier Katuala, les conséquences de cette instruction sont lourdes. D’un côté, les dirigeants de la BCC – dont la Gouverneure – s’exposent à des sanctions pour abus de pouvoir. De l’autre, les établissements de crédit se retrouvent dans une insécurité juridique majeure : bien qu’un délai leur ait été accordé, ils restent en situation d’illégalité et risquent des sanctions administratives et financières.
Face à cette situation, le député appelle à une collaboration constructive. « Je tends la main à la BCC. Si ma proposition de loi est adoptée, nous pourrons ensemble rectifier les erreurs de cette loi bancaire. Mais cela exige un retour à la légalité et au respect de nos institutions. »
Vers un débat houleux à l’Assemblée ?
Avec cette interpellation, c’est un débat de fond qui s’ouvre sur la gouvernance du secteur bancaire et les limites du pouvoir réglementaire de la BCC. L’Assemblée nationale devra se pencher sur un dossier explosif, où se mêlent enjeux juridiques, stabilité économique et respect des institutions.
Rédaction